Entrevue inspirante avec l’entrepreneure Madeleine Arcand, cofondatrice de Rose Buddha
Madeleine Arcand est cofondatrice de la compagnie de vêtements écoresponsables Rose Buddha, de l’application Méditations Rose Buddha et de l’école de yoga Espace Rose Buddha.
Quel est le parcours qui t’a mené à devenir entrepreneure?
Je suis une fille issue du milieu des communications qui travaillait comme journaliste à Radio-Canada. Après avoir eu mes enfants (j’en ai 4!), j’ai développé un intérêt pour la pratique du yoga et de la méditation. J’avais envie de vivre selon mes vraies valeurs profondes et de mener une vie à mon image. J’ai suivi la formation sur la méditation de Nicole Bordeleau qui s’échelonne sur une période d’un an et demi ainsi que les enseignements de Jon Kabat-Zinn. J’ai ensuite pris le temps de me questionner sur le genre de vie que j’avais vraiment envie de vivre pour la suite de mon existence et, plus précisément, comment je voulais me sentir au quotidien (dans la joie, avec un bas niveau de stress, etc.). Je me suis alors offert la liberté de choisir ce que j’avais réellement envie de faire.
Lors d’un voyage familial à Bali, j’ai découvert qu’il était possible de réaliser un tissu à partir de bouteilles de plastique recyclées. Au retour, sachant maintenant que je désirais lancer une entreprise gravitant autour de l’univers du yoga, j’ai développé, avec mes deux partenaires, Rose Buddha, une ligne de vêtements écoresponsables et éthiques. Le nom donné à la compagnie vient justement du cadeau de voyage que j’ai rapporté à Maxime, ma future partenaire, soit un beau bouddha tout rose…!
Quelles sont tes sources d’enracinement pour faire face aux défis?
Il est certain que c’est difficile de rester enraciné lorsque notre chiffre d’affaires se multiplie soudainement par dix et que vingt nouveaux employés sont maintenant nécessaires pour appuyer notre travail. Le passage à l’émission « Dans l’œil du dragon » a permis de faire découvrir et aimé notre produit à plus grande échelle et a donné une bonne notoriété à la marque. Dans ces circonstances, le stress se voit bien évidemment accentué.
On arrive à le gérer par la pratique de la méditation et du yoga pour rester calme à l’intérieur malgré le tourbillon constant qu’on vit à l’extérieur. C’est aussi pourquoi on a choisi d’adopter les principes bouddhistes et particulièrement ceux du slow living (vous pouvez en apprendre plus sur le sujet grâce à notre livre « À Go on ralentit »). On réussit ainsi à retrouver le calme plus rapidement, on apprend à relativiser (en créant des vêtements, on ne sauve pas des vies) et à toujours revenir au moment présent.
Comment ta vie en yoga t’aide à garder l’équilibre?
On a créé plus récemment L’espace Rose Buddha, un studio de yoga qui est à même notre lieu de travail. Ainsi, on y travaille à tous les jours, dans l’ambiance du yoga, avec plaisir et avec nos amis qui sont nos employés, le tout agrémenté par l’odeur de l’encens qui nous enveloppe et en sirotant du bon café.
Quel conseil donnerais-tu à une nouvelle entrepreneure?
J’avais reçu le conseil de commencer petit et d’y aller lentement. C’est ce qu’on a fait et je le recommanderais à tout nouvel entrepreneur. Mes partenaires et moi avons tous investis la somme de 400 $ chacun au départ, pour partir l’entreprise et ensuite…on a été chanceux! J’ajouterais aussi qu’il ne faut pas essayer de pousser un produit dans la gorge des gens mais plutôt de leur en offrir un dont ils ont vraiment besoin. Les ventes de leggings ont surpassé celles des jeans, pour la première fois, à l’échelle planétaire.
C’est tellement difficile de se faire connaître qu’on doit aussi savoir bien se différencier. Nos produits sont fabriqués ici, ils sont réversibles et les dessins sont créés par des artistes locaux.
Quels défis représentent le fait de fabriquer au Québec à base de matière recyclée et de s’engager pour l’environnement?
L’industrie du textile est la deuxième industrie la plus polluante après le pétrole. Après s’être demandé si ce qu’on mange est bio, si la façon de se déplacer pollue, on se questionne maintenant sur la trace faite par les vêtements que l’on porte. Même si notre coût de production est très élevé, l’important pour nous est de savoir que le parcours employé par nos produits s’est fait de manière éthique, écologique et non-chimique. On a choisi un style de vie et non de devenir millionnaire. Notre procédé n’est pas chimique, on n’utilise pas de solvant, il se fait par sublimation : une feuille de papier imprimée du dessin artistique qu’on colle et sous l’effet de la chaleur, l’encre s’évapore et le motif imprègne le tissu.
Quelle est ta façon de te ressourcer?
Au chalet dans la nature mais aussi au quotidien. Je m’impose une discipline de travail en m’obligeant à travailler des heures raisonnables et à prendre congé la fin de semaine. J’essaie de me ressourcer un peu, à plusieurs moments, tout au long de la journée. À chaque matin, je prends du temps sans email ni téléphone pour respirer l’air frais du dehors, m’occuper de mes enfants en pleine conscience puis méditer à l‘aide de mantras. Le soir, je termine tôt et je me plonge dans la routine avec les enfants en étant totalement présentes pour eux.
Comment arrives-tu à garder l’équilibre au quotidien?
La méditation est un outil merveilleux pour cela! Pour l’intégrer plus facilement dans la routine, on peut méditer de courtes périodes mais régulièrement. Comme le matin ou le soir, assis ou allongé dans le lit de 10 à 20 minutes, seule ou en étant guidée par un maitre (à l’audio). L’important est de s’entraîner à revenir au moment présent par l’attention sur le souffle, même si les pensées partent et reviennent sans cesse. J’offrirai une formation sur le sujet en février prochain (voir À 10 minutes du bonheur). Je pratique aussi religieusement le yoga deux fois par semaine, ce sont des rendez-vous fixes à l’agenda. C’est aussi important pour moi d’avoir un conjoint qui assume la moitié des tâches et qu’elles soient adéquatement séparées.
J’adhère au principe de non-attachement. Nos pensées et notre égo nous tendent constamment des hameçons pour nous faire sortir de notre chemin (idées négatives, pensées récurrentes, etc.) et comme un poisson dans l’océan, nous avons le choix de mordre ou de lâcher l’hameçon et de passer à autre chose. J’ai longtemps eu un hameçon dessiné sur ma main pour me rappeler ce principe.
Quelle est ta façon de redonner et son importance dans votre entreprise?
Pour moi, redonner, c’est s’occuper des gens que j’aime comme mes enfants, mon chum, ma mère, mes amis, etc. Le but de l’entreprise n’est pas de faire le plus d’argent possible mais bien de rendre nos employés heureux, tous des amis avec qui nous prenons plaisir à travailler.
Des ventes de Rose Buddha, on redonne à l’organisme Arbres Canada pour contribuer à replanter des arbres. À l’Espace Rose Buddha, où les profs de yoga sont le mieux payés à Montréal, on offre des cours le midi à 5 $ et les bénéfices ainsi que l’argent issu de la location des tapis de yoga sont remis à l’organisme Mère avec pouvoir, qui aide les femmes à retourner sur le marché du travail.
Comment t’inspires-tu?
Par les maitres qui m’ont formé : Jon Kabat-Zinn, Pema Chodron et Nicole Bordeleau mais aussi avec la lecture, les formations, les retraites (au Omega Center à New York par exemple) et la pratique. La méditation, ça s’apparente à un sport comme le patin, par exemple, même si tu as lu et tu connais toutes les bases, pour le maitriser et le parfaire, tu dois sauter sur la glace, tomber et te relever encore et encore.
Je lis aussi constamment des magazines, des livres et je scrute le web ou Pinterest à la recherche des tendances en mode, l’avenir du vêtement, les nouveaux textiles et couleurs, les façons de produire (Beside, Monocle, Dinette, etc.). Il faut toujours être à l’affût des dernières trouvailles car c’est ce qui inspire nos prochains produits comme notre sac en cuir d’ananas et le legging en filet de pêche recyclé, qui sortira très bientôt.
Qu’est-ce qui t’allume en ce moment?
J’adore les podcasts « 10% happier » qui traite de développement personnel, de joie de vivre, méditation et surtout de la vraie vie. Je me passionne des lectures sur le thème de ralentir (slow living) comme les contenus de Brooke McAlary (Slow Your Home podcast). Bref, tout ce qui m’aide et m’inspire à passer de faire à être.
Qui rêvez-vous d’habiller?
Au niveau international Gwen Stefani (la fille la plus cool au monde) et au niveau local, Cœur de pirate. On se demande continuellement, est-ce qu’elles porteraient ceci? Qu’est-ce qu’elles penseraient de cela?
Comment renouvelez-vous votre engagement face à l’environnement?
Jusqu’à maintenant, l’entreprise a réutilisé 150 000 bouteilles de plastique et cette contribution à l’environnement est très importante pour nous, voir vitale.
On se garde au courant des dernières découvertes, tant écologiques que scientifiques.
Où vous voyez-vous dans 10 ans?
À continuer de bien faire les choses, développer des produits qui nous rendent fiers et surtout sans se stresser.
À augmenter nos ventes au Canada et à l’International où nous avons déjà des clients en croissance, de façon organique (Mexique, France, Belgique, US).
À travailler moins, déléguer plus et à passer plus de temps au chalet….!
Comment nourris-tu l’entrepreneur en toi?
En restant connectée sur ce qui compte vraiment dans la vie : mes enfants, mon chum, la santé de tous, etc. En cultivant la joie au quotidien, en respirant et en m’ancrant toujours plus dans le moment présent, en pleine conscience.
Quel geste posez-vous pour garder votre entreprise (et vous) en santé?
En demeurant respectueux et en traitant tous égal les intervenants de la chaine de production, du responsable de l’envoi de courrier, au du service à la clientèle en passant par le photographe ou le graphiste. Rose Buddha ne serait rien sans eux. La santé (physique et psychologique) des gens qui travaillent dans l’entreprise est, pour moi, un synonyme de réussite.
Quelle est ta façon d’exprimer ta gratitude?
Le matin, la première chose que je fais en me réveillant, est de remercier la vie pour tout ce qu’elle m’offre : mes enfants, notre santé, mes parents, mes yeux, mes poumons, mon cœur, mes amis, mon travail, etc. Je suis d’un naturel expressif et je ressens la gratitude face à la vie à tous les jours car un rien réussi à m’émerveiller. Je me suis entrainée à dire régulièrement merci car tout peut être si éphémère et tout gagne à être apprécié, maintenant.
Ne manquez pas Madeleine Arcand à Expo Yoga & bien-être 2020!